Je pense que vous connaissez Charles McJilton, de Second Harvest Japan (voir pp. 9-10). A son avis, l’un des problèmes du Japon est ce qu’il appelle cette mentalité villageoise. Qu’en pensez-vous ?
H. H. : Il a raison. Le manque de collaboration est un énorme problème dans ce pays. Vous pouvez même le voir au niveau gouvernemental. Par exemple, le ministère de l’Education et celui en charge des Affaires sociales ne partagent aucune information afin de pouvoir traiter les problèmes efficacement. C’est dommage car si les gens ou les organisations mettaient leurs forces ensemble, ils pourraient arriver à de meilleurs résultats.
Que fait la Nippon Foundation pour s’attaquer à ces problèmes ?
H. H. : Nous ouvrons ce que vous pourriez appeler une version améliorée des cantines pour enfants. Ce projet s’appelle Daisan ibasho [Le troisième lieu], car il s’agit d’un lieu complémentaire après le foyer et l’école. Dans l’idéal, il offre quelque chose que ces enfants ne trouvent pas ailleurs. Nous pensons qu’il faut leur apporter un soutien scolaire et un lieu de vie après l’école car lorsqu’ils rentrent chez eux leur maison est vide vu que les parents travaillent. Pour ce faire, nous avons développé Daisan ibasho où jusqu’à 20 élèves du primaire peuvent venir cinq jours par semaine (du lundi au vendredi) entre 14h et 21h pour faire leurs devoirs, jouer et avoir un repas. Ces lieux ont un personnel formé appartenant à des associations locales. Notre rôle est de gérer l’aspect financier et organisationnel du projet, c’est-à-dire que nous fournissons l’argent et regroupons tous les partenaires (gouvernements locaux, ONG, entreprises et même les universités dont le travail consiste à évaluer les effets de ce projet). Le premier a été ouvert en novembre dernier à Toda, dans la préfecture de Saitama, au nord de Tôkyô. Un second a ouvert ses portes en juillet à Onomichi, dans la préfecture de Hiroshima. Nous avons déjà conclu des accords pour dix autres centres. Notre objectif est d’en créer une centaine d’ici 2020.
Avez-vous un système de contrôle ?
H. H. : Officiellement, nous n’en avons pas, mais il y en a un. C’est un point crucial parce que nous essayons d’éviter la stigmatisation de la pauvreté qui maintient beaucoup de gens pauvres loin de ces endroits. Donc, sur le papier, nous sommes ouverts à tous, mais pendant les entretiens, nous prenons soin d’évaluer la situation de tous et de ne garder que ceux qui ont le plus besoin de notre aide. En outre, nous obtenons des informations auprès des administrations locales, nous établissons des listes de familles dans le besoin et nous les passons aux associations qui entrent directement en contact avec elles. En dehors de cela, nous visons principalement les enfants de six à neuf ans parce que nous pensons que s’adresser aux plus jeunes enfants est beaucoup plus efficace.
Atteindre ces familles permet d’avoir de meilleurs résultats.
H. H. : Oui, même si nous avons pu constater que leur situation économique est moins bonne que nous attendions. En d’autres termes, soit ils nient leur situation, soit ils la connaissent mais ils ne pensent pas qu’ils ont besoin de notre aide. En fait, même de nombreux responsables locaux ne veulent pas admettre qu’ils ont un problème de pauvreté parce qu’ils ne veulent pas être considérés comme une ville pauvre. Comme vous pouvez le voir, il reste encore beaucoup de problèmes à résoudre.
Propos recueillis par J. D.
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