En suivant la ligne Chûô vers l’est, vous entrez dans un espace culturel riche et bien particulier.
La vaste banlieue située à l’ouest de Shinjuku a longtemps abrité de nombreux créateurs (écrivains, musiciens, etc.), et un grand nombre de mangaka et de spécialistes de l’animation qui y vivaient parce que les loyers étaient moins chers. Aussi la ligne Chûô a-t-elle occupé une place importante dans l’histoire du manga. Un certain nombre de personnes impliquées dans le magazine de manga avant-gardiste Garo (voir Zoom Japon n°43, septembre 2014) par exemple, résidaient à Asagaya. En ce qui concerne l’animation, plus d’un quart des 400 studios de production existant au Japon sont implantés dans l’arrondissement de Suginami, à Musashino et au-delà, dans une zone comprise approximativement entre les gares de Nakano et de Tachikawa. Au cours des dernières années, de plus en plus de magasins, de bars et de restaurants spécialisés dans la culture pop ont ouvert leurs portes, attirant de plus en plus de fans loin des centres habituels de consommation de l’anime et du manga.
Kôenji
Kôenji est peut-être, avec Shimo Kitazawa (Shimo-Kita), l’un des secrets les mieux gardés de la capitale. Comme Shimo-Kita, ce quartier a longtemps nourri une communauté locale d’artistes et d’intellectuels qui lui ont conféré une atmosphère particulière. La principale différence entre les deux endroits est peut-être que Kôenji présente une palette d’influences culturelles et musicales plus large et une tradition plus forte d’engagement politique anti-système. Il a, par exemple, été le point de départ des manifestations anti-nucléaires qui ont suivi l’accident à la centrale de Fukushima (voir Zoom Japon n°10, mai 2011). Dans le même temps, il conserve son caractère traditionnel, avec ses temples et ses rues commerçantes à l’ancienne. Il accueille, chaque été, le festival de danse traditionnelle Awa Odori (le dernier week-end d’août), qui attire environ 10 000 artistes et un million de spectateurs.
Le quartier est particulièrement célèbre pour deux choses : les vêtements de seconde main et la musique. Si vous prenez la sortie sud de la gare JR et allez à droite, vous tomberez rapidement sur l’entrée de la rue commerçante couverte PAL. Poursuivez dans cette direction et vous vous retrouverez dans Look Street (Rukku shôtengai). Kôenji compterait environ 100 magasins de vêtements d’occasion. Un quart d’entre eux se concentre dans cette rue, partageant l’espace avec des cafés branchés et quelques bâtiments d’avant-guerre qui ont échappé par miracle aux bombardements américains. Etant l’un des hauts lieux de la culture alternative pour les jeunes, Kôenji s’impose pour écouter toutes sortes de musiques indépendantes. Bien qu’il soit particulièrement connu pour être le berceau de la scène punk rock locale, les salles de concerts et les bars à musique proposent différents genres, du folk au glam rock, en passant par le jazz et la musique expérimentale.
Il n’est pas non plus surprenant que Kôenji regorge de magasins orientés vers la culture otaku (voir Zoom Japon n°72, juillet-août 2017). Au nord de la gare, par exemple, se trouve Ichibanboshi (2F 3-25-25 #203 Kôenji-Kita. Fermé le lundi), célèbre pour ses collaborations avec le fabricant de sofubi (figurines en vinyle) indépendant Real x Head. Ce magasin de jouets à l’ancienne est principalement spécialisé dans les personnages de cinéma et de télévision (Godzilla, Astro Boy, Ultraman, Kamen Rider, etc.). À l’intérieur, tout l’espace est occupé par des vitrines remplies de jouets en vinyle, tandis que sur les murs d’autres figurines sont suspendues dans des enveloppes en plastique.
Si vous aimez Star Wars, n’oubliez pas de visiter le magasin voisin, Star Case, sinon suivez la voie ferrée jusqu’à ce que vous trouviez Gojira-ya (2F 3-67-1 Kôenji Minami, de 14h à 21h. Fermé le mardi et le mercredi). Le magasin (l’un des plus anciens pour les collectionneurs de jouets de la capitale) se trouve au deuxième étage. En dehors des nombreux produits dérivés de Godzilla, on trouve à peu près les mêmes objets que chez Ichibanboshi (mais le propriétaire est moins grincheux). Il y a des vitrines remplies de figurines rares en vinyle et de jouets moulés, puis des livres, des poupées, des maquettes, des affiches de cinéma, etc. Au rez-de-chaussée, le bar Gojira-ya. (De 14h à 18h et de 20h à 4h. fermé le dimanche) est idéal pour faire une pause et plonger dans l’atmosphère rétro des années 1970.
Sur le chemin du retour, vous voudrez peut-être vous arrêter dans un autre bar situé à droite de la rue étroite, à côté de Bar Alba. Il s’agit de MT Base (MT Kichi, 3-59-9 Kôenji-Minami. A partir de 20h). MT pour Moso (“illusion”) Tôhi (“évasion”) ou “évasion dans un fantasme” est le “bar du cosplay et de l’anime”. Il se présente comme le meilleur endroit où les otaku peuvent “unir leurs forces pour lutter contre la réalité”. Une armée d’hôtesses en tenue militaire vous attend pour discuter et partager avec vous leur intérêt pour les mangas, les jeux, etc. Il existe un forfait de 3 000 yens avec boisson à volonté valable 60 minutes. Pour les amateurs de karaoké, il vous en coûtera 200 yens la chanson. Kôenji est un endroit vraiment intéressant à explorer. Vous pourrez vous amuser à chercher les lieux présentés dans la série animée Accel World produite par Sunrise, ou, si vous le souhaitez, à vous perdre dans ses ruelles tout en essayant de retrouver l’atmosphère créée par Murakami Haruki dans son roman 1Q84.