Lorsqu’on lui demande quels sont les sujets qui intéressent le plus les lecteurs de son journal, Baba Yukio mentionne rapidement les relations entre le Japon et la Corée du Nord, en particulier le problème épineux des enlèvements. En commençant par Yokota Megumi en 1977 (voir Zoom Japon n° 47, février 2015), au moins cinq habitants de Niigata auraient été enlevés par les services secrets nord-coréens dans le but d’enseigner à leurs agents la langue et les coutumes japonaises. Le cas de Megumi est celui qui a attiré le plus d’attention, parce qu’elle n’avait que 13 ans lorsqu’elle a disparu en rentrant de l’école. Comme l’explique le journaliste du quotidien, Hara Takashi, deux facteurs expliquent que la préfecture soit devenue le terrain de chasse préféré des Nord-Coréens. “Tout d’abord, Niigata est le point le plus proche de la Corée du Nord. Il n’y a que 900 kilomètres entre les deux côtes. Par ailleurs, et c’est peut-être le point le plus important, il existe un lien historique entre Niigata et la Corée : de nombreux immigrants coréens qui avaient travaillé au Japon dans les années 1930 et 1940 ont été rapatriés après la guerre, et les navires qui les ont ramenés chez eux étaient partis de Niigata. Il était donc facile pour les espions communistes d’infiltrer le Japon”, explique-t-il. Le reporter fait partie de l’équipe qui couvre l’affaire depuis l’enlèvement de Megumi. Leur travail inlassable pour découvrir la vérité a été reconnu, en 2004, lorsque le Niigata Nippô a remporté un prix pour la série d’articles “Enlèvements – Corée du Nord”. “L’important pour nous est de garder le dossier ouvert et de veiller à ce que cette histoire ne soit pas déformée ou récupérée à des fins politiques comme est tentée de le faire la droite japonaise. Nous avons le devoir de veiller à ce que le sort de Megumi ne soit pas oublié”, ajoute-t-il.
A 56 ans, le rédacteur en chef Baba Yukio est un vétéran du Niigata Nippô. Il y travaille depuis 35 ans et a vu le quotidien subir plusieurs changements. “Actuellement, 512 personnes travaillent pour le journal. Nous avions un tirage d’un demi-million d’exemplaires, mais ces dernières années, il a baissé en raison de la crise qui frappe le secteur des médias. Le phénomène s’est aggravé avec le déclin de la population dans la préfecture”, regrette-t-il. En 2019, l’édition matinale du journal avait un tirage de 420 000 exemplaires, avec une part de marché de 70 % à l’intérieur de la préfecture, tandis que son édition du soir s’écoule à plus de 38 500 exemplaires. La gigantesque imprimerie du Niigata Nippô à Kurosaki a pris la place de l’ancien siège du journal. Elle assure aussi l’impression des éditions locales de plusieurs journaux nationaux tels que le Yomiuri Shimbun et le Nihon Keizai Shimbun, soit environ 60 000 exemplaires par jour.
“Nous avons toujours essayé de placer les gens au centre de notre travail non seulement en tant que lecteurs, mais aussi en leur donnant la chance de contribuer activement à notre contenu. Pendant longtemps, nous avons eu une chronique de lecteurs animée appelée “Mado” (la fenêtre) tandis qu’une fois par semaine nous publions une rubrique avec leurs contributions poétiques. Nous sommes également le seul quotidien japonais à publier des nouvelles rédigées par ses lecteurs”, explique avec fierté le patron de la rédaction.
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