A 27 ans, Asano Moteki s’est lancé dans un projet de restauration tout en ne renonçant pas à son envie d’enseigner.
C’est en avril 2016 que, pour la première fois dans la région, un magasin spécialisé dans les “French toasts” ( variété de pain perdu) s’est ouvert dans le quartier commercial provisoire situé dans le centre-ville d’Ishinomaki. Le gérant de Nice Picnic Day, Asano Moteki est originaire de Nagoya, mais a vécu toute sa jeunesse dans le village d’Otari au cœur des Alpes japonaises. “Si j’avais quelque appréhension en arrivant ici, je peux dire, à présent, que j’ai des amis avec qui je m’entends bien. Maintenant, mon objectif c’est d’obtenir le droit de résidence permanent à Ishinomaki !”, confie-t-il en souriant.
A 8 ans, quand il avait dû s’installer à Otari en raison du travail de ses parents, il y avait très peu d’enfants dans sa nouvelle école. Aussi l’avait-il bien apprécié, car les enseignants et les élèves étaient très proches les uns des autres, alors qu’à Nagoya, il avait eu du mal à s’intégrer dans la classe. Après le collège, Asano Moteki a suivi sa scolarité par correspondance tout en travaillant dans une usine de ferronnerie suite à des problèmes financiers. Après le lycée, bien que souhaitant devenir enseignant, il a continué de travailler en usine pendant deux ans “parce que je n’avais pas d’autre choix.” Deux années plus tard, à 20 ans, un proche de la famille l’a aidé financièrement à s’inscrire à l’Université Nihon-Fukushi, spécialisée dans le domaine du soutien social et éducatif.
A la fin de sa première année universitaire lorsque s’est produit le séisme, il s’est immédiatement porté volontaire pour répondre à la demande d’aide relayée par l’université. On craignait alors, qu’un autre séisme de grande ampleur ne se produise, également dans la région de Tôkai, au sud de l’archipel. “J’ai considéré cette demande comme une véritable mission”, raconte-t-il. Un mois après la catastrophe, Asano Moteki était toujours présent à Ishinomaki. Tout le reste de ses longues vacances, il les a passées à se lancer dans d’autres activités bénévoles. Mais le temps était venu de faire un choix professionnel. Certes, son rêve était toujours de devenir enseignant, mais d’un autre côté, il s’était attaché à Ishinomaki et à ses habitants qu’il côtoyait souvent. Ce n’était pas facile de trancher. En dernière année universitaire, en juillet, n’ayant toujours pas pu choisir entre les deux possibilités, il s’est présenté aux concours de recrutement des enseignants pour les préfectures d’Aichi et de Miyagi. Mais, il a échoué. En septembre, lors d’un stage de rattrapage, un professeur lui a glissé à l’oreille : “si tu veux vraiment devenir enseignant, tu pourras toujours tenter le coup plus tard”. Il s’est alors dit : “Je remets à demain ce que je ne peux pas faire aujourd’hui”.
En février, un mois avant les examens de fin d’études, il a finalement décidé de s’installer définitivement à Ishinomaki. Il a participé à l’ouverture d’un restaurant associatif, tout en effectuant des petits boulots de pêche et de chantier, et, à aucun moment, il n’a songé quitter Ishinomaki. Profitant de ses expériences dans le domaine de restauration, il a ouvert Nice Picnic Day qui correspond tout à fait à son souhait de créer “un lieu ouvert à tous”.
“Avec d’autres, nous travaillons dans le secteur de la restauration au travers duquel nous souhaitons créer une communauté. L’an dernier, j’ai été submergé par des tas de questions administratives. Cette année, nous allons essayer de faire participer un maximum de personnes à divers événements et ce ne sont pas les idées qui manquent”, assure-t-il. Il ne sait pas s’il réussira ou non. “Le succès n’est pas l’élément le plus important. Ce qui est primordial c’est que les jeunes puissent continuer à s’impliquer dans ce lieu”, explique-t-il. Dans cette ville d’Ishinomaki, Asano Moteki est bien déterminé à relever le défi.
Ohmi Shun, Hirai Michiko