Cette année 2025, au Japon, vous entendrez souvent le terme Shôwa. Il s’agit du nom de l’ère impériale entre 1926 et 1989, qui fut suivie par Heisei (1989-2019), puis Reiwa actuellement. On célèbre donc le centenaire de cette période historique nippone, marquée par la Seconde Guerre mondiale et la forte croissance économique. Ce fut une époque chaotique, mais qui porta l’espoir d’un avenir radieux. C’est pourquoi, depuis quelques années, la culture et la mode de cette époque reviennent, portées par une vague de nostalgie.
Alors, les Shôwa umare, les personnes nées sous l’ère Shôwa – comme moi –, sont-elles fières d’avoir connu cette “belle époque” ? Je réponds “oui !” sans hésiter. Avoir été témoin, et parfois acteur, de cette époque est un véritable trésor de vie. Mais être appelée Shôwa umare n’est pas toujours un compliment, dans un pays où les générations sont repérées selon l’ère impériale de leur naissance. Aujourd’hui, Shôwa umare rime presque avec “vieux bornés”. Pour beaucoup d’entre eux, la norme, c’est : le mot “sexisme” n’existe pas, le travail est une vertu à laquelle on ne compte pas ses heures – il passe avant la famille. Le système d’ancienneté va de soi, et tout harcèlement fait partie de “l’éducation”. Cette mentalité aurait été forgée à l’époque de l’Empire du Japon, où l’effort, l’endurance et le dévouement au collectif étaient la norme.
Mais ce modèle est en train d’être bousculé par les Heisei umare, qui ont aujourd’hui entre 6 et 36 ans, et souffrent de la précarité – un héritage toxique de Shôwa. Ils ont raison. Mais que proposent-ils, eux qui ont bénéficié d’une éducation moins exigeante ? Ah, cette question est très Shôwa, non ? Je reconnais cette pression… sauf que mon esprit Shôwa s’est malgré tout allégé grâce à la vie en France ! Mes amis français m’ont appris que je suis l’égale de tous, et que je dois privilégier ma vie privée plutôt que le travail. Je suis même prête à créer un syndicat ! Mais… et si mes amis étaient des Shôwa umare à la française ?
Koga Ritsuko