Pour saisir l’importance jouée par la Compagnie des Indes orientales (Vereenigde Oostindische Compagnie, VOC) fondée en 1602, un an avant que le shôgun Tokugawa Ieyasu décrète de fermer son pays à la présence étrangère, il suffit de se rendre à l’Oost-Indisch Huis (Oude Hoogstraat 24), son siège, construit en 1606. Aujourd’hui propriété de l’Université d’Amsterdam, le bâtiment ne se visite pas, mais on peut en admirer la grandeur et se souvenir qu’il a abrité les activités de la première multinationale et société par actions de la planète. La VOC n’a pas régné sur le commerce mondial seulement grâce à son comptoir japonais, mais elle était la seule à bénéficier d’un accès au Japon. Il ne faut donc pas s’étonner qu’il reste encore des traces de cette relation forte qui a duré 250 ans avant que les autres Occidentaux s’imposent. Les Japonais, sans le savoir, utilisent au quotidien de nombreux mots néerlandais. De bîru (bier, 1724), la bière, à garasu (glas, 1763), le verre, en passant par kôhî (koffie, 1797), le café, le vocabulaire nippon s’est enrichi au fil du temps grâce aux Hollandais tandis que, dans le même temps, les Européens ont pu s’imprégner de l’artisanat et de l’art japonais rapportés sur le vieux continent par les navires de la VOC.
Faut-il y chercher les racines de l’intérêt que les Européens manifestent aujourd’hui pour la culture venue du pays du Soleil-levant ? La question est ardue à trancher, mais il est un fait qu’Amsterdam reste un lieu important pour rester en contact avec le Japon. A la différence du passé, les Japonais sont désormais installés en nombre aux Pays-Bas. La fiscalité avantageuse des autorités néerlandaises a incité plusieurs entreprises nippones à y implanter leur siège européen. On recense aujourd’hui 8 000 Japonais résidents en Hollande, dont la moitié à Amstelveen, à quelques kilomètres d’Amsterdam. Le lien reste donc fort et explique pourquoi certains Japonais privilégient les Pays-Bas pour renforcer les échanges culturels avec l’Europe. C’est le cas notamment de Yoshida Ryûtarô, président de Time & Style spécialisé dans la promotion de l’artisanat et l’art de vivre nippon. Disposant de plusieurs boutiques à Tôkyô et d’une usine à Hokkaidô, il souhaitait ouvrir une antenne sur le vieux continent. “Amsterdam s’est imposé comme une évidence”, confie-t-il. “Les gens sont ici très sensibles au sens de la beauté que nous défendons. Le fait que les maisons soient ouvertes vers l’extérieur avec leurs grandes fenêtres constitue un autre point important car cela permet de mettre en valeur les objets que les gens apprécient”. Il a donc pris possession, en 2017, d’un ancien poste de police (Marnixstraat 148, du mardi au samedi 11h-19h, dimanche 11h-18h, www.timeandstyle.nl) et propose sur trois étages une sélection de produits variés (meubles, vaisselles, objets décoratifs) mais uniques à travers lesquels il met en valeur un savoir-faire ancestral. “Nous voulons le préserver et nous utilisons les techniques acquises par nos ancêtres pour créer des objets qui vont trouver une nouvelle place dans la vie moderne”, ajoute-t-il. C’est la raison pour laquelle il invite régulièrement des artisans à venir exposer leur travail mais aussi à expliquer à un public curieux et nombreux lors des vernissages le processus de création. Céramistes, ébénistes et autres maîtres verriers peuvent ainsi élargir leur audience et trouver des acquéreurs pour leurs objets. Difficile de résister d’autant que les prix sont loin d’être prohibitifs. D’autres créateurs japonais choisissent aussi Amsterdam pour se lancer sur le vieux continent. Chaque année, début février, le Lloyd Hotel accueille le salon Mono Japan (du 1er au 3 février, de 10h à 18h, Oostelijke Handelskade 34, https://monojapan.nl) dans une ambiance particulière puisque les artistes y logent et déballent tous les matins leurs produits. Inutile de dire que cela vaut le déplacement avec la garantie de trouver quelque chose qui enrichira votre intérieur. De nombreux workshops y sont organisés. Pour en savoir plus et acheter votre billet d’entrée, reportez-vous au site Internet de Mono Japan.
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